DOSSIER SUR LA TORTURE DANS LA GUERRE DE LIBERATION (Le Monde)
Florence Beaugé, Le Monde, 19 juin 2000
« J’Était allongée nue, toujours nue . Ils pouvaient venir une, deux ou trois fois par jour . Dès que j’entendais le bruit de leurs bottes dans le couloir, je me mettais à trembler . Ensuite , le temps devenait interminable. Les minutes me paraissaient des heurs, et des heures des jours. Le plus dur, c’est de tenir les premiers jours, de s’habituer à la douleur. Après, on se détache mentalement, un peu comme si le corps se mettait à flotter » quarante ans plus tard, elle en parle avec la voix blanche. Elle n’a jamais eu la force d’évoquer avec sa famille ces trois mois qui l’ont marquée à vie, physiquement et psychologiquement. Elle avait vingt ans. C’Était en 1957, à Alger. Capturée par l’armée française le 28 septembre, après être tombée dans une embuscade avec son commando, elle avait été transférée, grièvement blessée, à l’état-major de la 10e division parachutiste de Massu, au Paradou Hydra » Massu était brutal, infect. Bigeard n’était pas mieux, mais, le pire, c’était Graziani. Lui était innommable, c’était un pervers suis prenait plaisir à torturer . Ce n’était pas des êtres humains . J’ai souvent hurlé à Bigard : « Vous n’êtes pas un homme si vous ne m’achevez pas ! » Et lui me répondait en ricanant : « Pas encore , pas encore ! »
L’ALGERIE DANS LA VIOLENCE TEMOIGNAGE D’UN CIVILE pemf ados
« Je lui ai dit , quand ça a commencé les bombes dans les marchés , de ne plus aller toujours aux même pour diminuer les risques … c’est se que je fais moi , dans ma vie … en bougeant je diminue les risques … » Il m’a dit : « Oui, tu as raison mais sa fais trente ans que je fais mon marché là » Et je trouve que sa résume tout , c’est une forme de résistance , de calme , presque d’insouciance ou d’inconscience . Sinon on va se mettre sous la couverture et attendre que la mort tombe ? Non !
LE MONDE . DOSSIER DOCUMENT 1er novembre 2001 GEORGES FOGEL : SOLDAT Français appelé en Algerie
Dans le secteur d’El Milia début 1956 j’ai découvert la torture . « j’y ai assisté plusieurs fois . Ils m’invitaient pour que j’ai le renseignement tout chaud . Ça se passait dans les caves aménagées de la gendarmerie flambant neuve . Le ciment était tout propre . Des arrivées d’eau avaient été prévues , une sorte de baignoire et des lavabos installés .
Au début en Indochine comme en Algerie , les militaires utilisaient la gégène , c’est-à-dire un génératrice de poste de radio produisant un courant électrique de 80 volts. Par la suite , les inspecteurs utilisaient le courant du secteur . Dans la cave de la gendarmerie d’El Milia , ils ne s’embêtaient pas à tourner la manivelle . Ils se branchaient sur les 110 volts . Ils pinçaient une électrode à l’oreille et l’autre à la verge . Les résultats étaient terribles ; les hommes se révulsaient … J’était horrifié, je me disait : « Il faut que je vois pour qu’on puisse dire un jour : sa a existé. Je n’ai pas été courageux . Sinon j’aurais hurlé mon dégout , je n’ai rien dit , j’ai subi .
|